La Route 66
La Route 66… la route mythique parmi les routes de légendes qui sillonnent les USA. Aux côtés du voyage à New York, des plages de Floride et des parcs de l’Ouest, c’est le grand voyage le plus apprécié par les visiteurs européens. Dans l’imaginaire populaire, la Mother Road est avant tout associée à l’histoire américaine et à cet art du kitch que l’on appel Americana. Bercés par les films et par les vieux tubes de R&B, nous avons tous en tête ces images de villes poussiéreuses, avec une vieille station-service et un motel plein de néons. Ces scènes existent toujours le long de la route 66 (bien qu’elles soient devenues rares).
Californie
Nous commençons notre périple par la fin, si je peux dire. La Route 66 débute à Chicago mais en tant que visiteurs c’est le plus souvent à l’envers et donc depuis Los Angeles que l’on emprunte la fameuse « rue principale » de l’Amérique. Depuis les belles plages de Santa Monica jusqu’au terres brulées de soleil du désert de Mojave, en passant par les vergers (ce qu’il en reste du moins) de citronniers et d’orangers de la vallée de San Gabriel, la Route offre un bel éventail des paysages de la Californie du sud. La Route 66 est presque intacte en Californie, le plus souvent indiquée par des signes ‘Historic Route 66’ facilement repérables. Dans le désert de Mojave, la route s’appelle National Old Trails Highway pour la bonne raison qu’il s’agissait du nom originel de la 66, avant que les voies américaines ne soient numérotées.

Santa Monica, fameuse station balnéaire de l’agglomération de Los Angeles. Nous sommes ici au terminus de l’ancienne Route 66, sur les rives de l’océan Pacifique. Quelques pâtés de maisons au sud se trouvent la fameuse jetée de la ville et ses fêtes foraines. Plus au sud encore, une promenade permet de rallier Venice Beach, le plus décalé des quartiers balnéaires de L.A. Une plaque marque la fin de la route et rend hommage à Will Rogers (la Route 66 était également nommée la Will Rogers Highway). Willy était un pionnier, né en Oklahoma il faisait partie des célèbres Okies, ces habitants des plaines venus en Californie pour y vivre. Il est devenu l’une des plus grandes stars de cinéma de son époque, mais c’était aussi un grand voyageur (il est d’ailleurs décédé dans un crash aérien en Alaska) et il fut également le maire de Beverly Hills ! La plaque le décrit comme « comique, grand voyageur et voisin sympathique ».

La Route 66 suit l’actuel Santa Monica Boulevard. Nous sommes ici au niveau de Third Street Promenade, un célèbre site touristique de Santa Monica. C’est une zone commerciale piétonne très animée. Le quartier est l’un des plus agréables de Los Angeles. On peut y marcher (ce qui n’est pas si fréquent dans cette immense métropole), on y trouve de nombreux artistes de rues et bien sûr une profusion de cafés branchés, de librairies, de restaurants et de boutiques de mode.

On imagine généralement que s’il y a bien un lieu où la Route 66 a dû être engloutie par le modernisme, c’est Los Angeles. Détrompez-vous ! La route existe toujours sur la quasi-totalité de son tracé. Évidemment nous sommes bien loin de l’ambiance petite ville des débuts et la route prend désormais place sur de larges avenues encombrées. On arrive tout d’abord à Beverly Hills que la route traverse dans les grandes lignes. Pour découvrir les quartiers résidentiels ultra chics de la ville et les boutiques de luxe de Rodeo Drive, il faut faire quelques détours.

Après Beverly Hills, la route nous conduit à West Hollywood, quartier animé de Los Angeles. Nous sommes ici à un carrefour assez typique de la cité des anges, où règne la voiture, les fast-foods et les palmiers. Le boulevard longe le parc de Hollywood Forever (ici dans notre dos) qui n’est pas banal car il s’agit d’un cimetière où l’on diffuse en soirée les films de certains résidents, acteurs ou réalisateurs célèbres.

A l’est d’Hollywood, le boulevard Santa Monica rejoint le fameux Sunset Boulevard qui poursuit la Route 66. Le boulevard Sunset est ainsi nommé car il mène vers l’océan et ses superbes couchers de soleil mais dans le sens où nous sommes nous laissons les couchers de soleil dans notre dos. Sunset Boulevard mène vers Downtown, la grappe de buildings qui semblent surveiller l’immensité de l’agglomération de L.A.

Arrivé à Downtown, nous voici à l’entrée d’Olvera Street. C’est le cœur historique de Los Angeles, à une époque où la cité n’était encore qu’un village aux influences mexicaines, un pueblo. Olvera Street est désormais une rue commerçante sur le thème du Mexique. Inutile de venir y chercher une quelconque authenticité, entre les stands de tacos et les boutiques de souvenirs, le vieux L.A est surtout une attraction touristique.
A l’est de Downtown, la Route 66 se dirige vers Pasadena et se perd quelque peu dans les méandres des autoroutes de L.A. Il est possible d’emprunter l’autoroute 110 (la première du genre, ouverte en 1939) ou bien de suivre Figueroa Street qui est parallèle à l’autoroute (une rue interminable qui quadrille l’agglomération et que l’on appel à L.A une « surface street »). Le long de Figueroa, ne pas manquer le Dodger Stadium et l’un des meilleurs musées sur les amérindiens, le Southwest Museum. De quoi vous mettre dans l’ambiance pour la longue route à venir dans les déserts du sud-ouest.

L’autoroute arrive à Pasadena, la ville phare de l’est de Los Angeles. Figueroa Street pour sa part vous accompagne en grande pompe via le Colorado Boulevard Bridge. Cette élégante construction symbolise toujours l’entrée dans la cité des anges (bien que l’agglomération se poursuive bien au-delà) pour les voyageurs en voitures. Pasadena est un endroit très sympa, célèbre pour le fameux Rose Bowl, stade où se déroule la compétition du même nom qui a fait fantasmer des générations d’américains sur le climat idyllique de la Californie (les spectateurs sont en t-shirt et il y a des fleurs partout tandis que le reste du pays est sous la neige).

Le centre de Pasadena est un coin animé. Appelé Old Pasadena, c’est une rénovation du centre historique de la ville. On y trouve des restaurants et des boutiques dans des rues bien agréables.

Nous sommes ici à Upland, une ville banale où se trouve ce signe (ici en travaux) qui marquait la fin de la National Old Trails Highway (ancêtre de la Route 66). On peut voir également des lampadaires rénovés dans le style de l’ancienne route. Passé Pasadena, la Route 66 s’aventure donc dans la vallée de San Gabriel, royaume des banlieues de Los Angeles mais autrefois la porte d’entrée du sud californien pour les voyageurs. Du temps des premiers colons et des pionniers, ils y découvraient un environnement paradisiaque, fait d’immenses étendues de citronniers et d’orangers, de fleurs et de ruisseaux. Aujourd’hui les vergers sont rares et on fait place à des lotissements, des centres commerciaux et des avenues rectilignes. La route passe par Colorado Boulevard puis Huntington Drive avant d’emprunter le long Foothill Boulevard. Les montagnes, parfois enneigées en hiver, dominent la vallée.

Au carrefour de deux avenues de la ville résidentielle de Fontana, à l’est de la vallée de San Gabriel. C’est une ville banale mais c’est ici qu’est apparu le club de motards des Hell’s Angels. Un club qui deviendra plus tard l’un des principaux gangs de Californie. Un nom qui fait toujours frissonner les californiens.

Nous sommes là sur la petite route qui longe l’autoroute pour passer le col de Cajon (ou Cajon Pass) qui sépare le bassin verdoyant de Los Angeles, des étendues arides de l’est californien. Sur le col, le paysage change et la végétation devient plus clairsemée.

A la sortie du col, avant Victorville, il reste en bord de route (d’autoroute précisément) une adresse historique de la Route 66, le Summit Inn. La situation de ce restaurant de bord de route n’est pas exemplaire mais les nostalgiques seront ravis d’y faire un stop.

Arrivée à Victorville, première vraie cité de la région aride du sud-est californien. Le soleil y est implacable et les jardins fleuries de Beverly Hills et Pasadena semblent bien loin. La route passe par 7th Street, qui est la rue centrale de Victorville. On peut encore y voir quelques adresses typiques comme le New Corral Motel avec son enseigne kitch. Nous sommes ici devant le musée de la Route 66 qui accumule les objets liés à la fameuse artère.

Après Victorville, pour suivre l’ancien tracé de la Route 66, il faut faire une boucle dans le désert de Mojave. On passe alors par divers villages de désert. Ici, à Oro Grande, nous avons une idée de l’aridité de l’environnement. La vie s’y déroule à des années lumières de L.A.

Le village d’Helendale, où l’on pouvait trouver il y a quelques années un musée dédié à l’art du striptease et appelé Exotic World. A la fermeture du musée, la ville s’est définitivement endormie dans le désert.

Nous arrivons à Barstow. Dans l’absolu c’est une petite ville au milieu du désert mais dans la pratique c’est un grand carrefour, à mi-chemin entre Los Angeles et Las Vegas. C’est le premier site de ravitaillement dans le désert. Loin d’être une ville très sympathique ou agréable, Barstow est surtout un lieu de passage. Malgré la présence de toutes les enseignes que l’on trouve à travers le pays, Barstow est une cité où la vie semble difficile et monotone. L’avènement des autoroutes a d’ailleurs laissé une bonne majorité des anciens restaurants et des motels de la Route 66 sur le carreau.

A l’est de Barstow, la Route 66 existe le long de l’autoroute 40. Daggett, petite ville minière et ferroviaire est une étape atmosphérique. Une cité du désert, noyée sous des chaleurs extrêmes en été, qui voit passer d’immenses trains de marchandises et où vit une poignée d’habitants.

Un peu plus loin, isolé au bord de la route, dans un paysage immense et désert, nous arrivons au fameux Bagdad Café. Ce petit établissement doit sa survie au film du même nom. C’est le centre du hameau de Newberry Springs et son unique restaurant.

Nous sommes à Ludlow, ville au beau milieu du désert de Mojave. C’est ici le carrefour central du village, qui compte une station-service (Chevron, grande marque américaine), quelques cafés et un motel. La vie dans le désert californien est bien loin des clichés du Golden State.

Une boucle via la National Old Trails Highway nous amène à Amboy, une bourgade quasi fantôme ou se trouve l’une des grandes adresses du passé de la Route 66. Dans les années 1940, Roy’s était un commerce florissant, comptant un motel, un restaurant et un garage. Près de 90 employés faisait tourner la boutique 24h/24, afin de gérer le flot des automobilistes. L’ouverture de l’autoroute 40 a scellé le destin de Roy’s mais la boutique existe toujours.

La boucle complète de l’ancienne route passe par des hameaux du bout du monde, comme ici à Goffs. Les amateurs de petites routes et de désert seront aux anges.

Dernière étape (ou première) de la Route 66 en Californie, Needles est une petite ville d’environ 5.000 habitants. Un vrai îlot de civilisation dans cette région désertique. Son nom, ‘les aiguilles’, lui vient d’une série de pierres très affutées que l’on trouve près de la rivière Colorado. Comme le reste de la région, Needles est un vrai four une bonne partie de l’année. C’est également l’un des lieux les plus ensoleillé du monde. Ce climat, que certain jugeront trop aride, fait tourner l’économie touristique de Needles. La Route 66 traverse la ville de part en part, passant sous l’autoroute 40.

Nous sommes dans le centre-ville de Needles, dont l’architecture n’est pas déplaisante. Après la ville, la Route 66 descend vers le sud sur quelques miles en longeant le Colorado puis traverse la rivière pour passer dans l’état de l’Arizona et entamer sa longue traversée du sud-ouest américain. Un autre chapitre à découvrir le long de la Mother Road.